Christophe Tafelmacher, avocat et militant, Lausanne (Suisse)
Résumé
L’auteur analyse certaines évolutions législatives récentes en Suisse qui instituent des atteintes au principe de proportionnalité et qui limitent fortement le rôle du juge. Cet état de fait a des conséquences pour le travail de l’avocat qui se sent lui-même réduit à une certaine impuissance. Comment faire face à ces dégradations du cadre de l’Etat de droit ?
Introduction
Dans le cadre de précédents colloques[2], j’ai montré ce que la violence étatique dans le droit d’asile et d’immigration suisse disait de la transformation du cadre juridique et politique formé par l’État dit « de droit ». Puis, me situant dans la perspective des concepts élaborés par José Bleger, j’ai analysé l’émergence de discours politiques, voire de pratiques, empreintes de contradictions qui pourtant ne sont pas perçues par les citoyen.ne.s, ce qui a permis la remise en cause de ce cadre.
J’ai notamment insisté sur les mécanismes de renversement des significations, à mon sens typiques de la vision du monde néo-libérales et des politiques qu’elle préconise. Un exemple frappant en est donné en Suisse par la notion de « l’aide d’urgence », définie par le Tribunal fédéral suisse en 1995, puis ancrée dans la Constitution fédérale en 1999, comme le droit de tout individu en situation de détresse à recevoir une aide de l’État, et aujourd’hui transformée en mesure de contrainte étatique contre des dizaines de milliers d’individus déboutés du droit d’asile[3].
J’ai également souligné l’importance qu’ont prise a cours de la dernière décennie les attaques portées contre le principe de proportionnalité par le biais de l’élaboration de mesures légales au caractère automatique[4]. Menées par un parti gouvernemental d’extrême-droite[5] avec une rhétorique xénophobe, ces attaques ont mis en avant la figure de « l’étranger criminel » pour viser en réalité ce principe qui se trouve au cœur de l’Etat de droit. Protection historique du citoyen contre l’Etat et contre l’arbitraire, le principe de proportionnalité implique notamment de ménager la marge de manœuvre des juges chargés d’appliquer les lois. Partant, il rend également possible de travail de l’avocat, qui a un rôle à jouer dans l’interprétation et l’application de ces lois aux cas concrets. Or, lorsqu’on met en place un système d’automaticité, il n’y a plus de possibilité d’appréciation, et, par définition, plus de proportionnalité.
Je souhaite ici poursuivre ces analyses et réflexions en focalisant mon attention sur quatre exemples de ces politiques « automatiques » qui se sont traduites sur le plan du droit par des systèmes autoritaires et dépourvus des protections que serait supposé offrir l’Etat de droit classique.
Le régime « Dublin » en matière de droit d’asile
Dans le système « Dublin », la demande d’asile n’est examinée que par un seul État-membre de l’Union européenne (UE), celui par lequel la personne a franchi pour la première fois les frontières extérieures[6]. Adopté dans un premier temps comme une convention entre Etats de l’UE signée à Dublin, le système a été ensuite traduit dans des règlements européens. A la suite des accords passés en la Suisse et l’Union européenne, la loi suisse sur l’asile (LAsi) intègre les dispositions des Règlements « Dublin II », respectivement « Dublin III », du Conseil de l’UE.
Comme il est presque impossible d’entrer en Suisse sans avoir au préalable passé par un pays de l’UE, la Suisse peut liquider une partie importante des demandes d’asile qui lui sont présentées sur la base du Règlement « Dublin »[7]. Le problème qui apparaît est le suivant : les décisions prises par l’administration suisse n’examinent plus du tout les motifs d’asile, pas plus que les raisons qui ont amené les personnes concernées à venir en Suisse. Elles ignorent également les conditions de vie dans le pays du « premier accueil » présumées équivalentes à celles qu’offre la Suisse, quand bien même de nombreux rapports d’associations et des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme démontrent le contraire[8].
Dans l’application du Règlement « Dublin », le critère du premier pays de transit est le seul qui est pris en compte. Cet élément « objectif » prend ainsi le dessus sur toute autre considération ou appréciation du cas individuel. Il existe bien une « clause de souveraineté » qui a été aménagée dans les textes légaux, et qui permettrait en théorie à la Suisse de prendre en charge l’examen de demandes d’asile qui pourraient échoir à la compétence d’un autre Etat. Mais celle-ci n’est jamais utilisée[9], même dans des cas où l’on admet que la personne concernée a été victime de traite d’êtres humains et qu’on prétend la renvoyer dans un Etat où il est notoire que les dispositifs d’accueil et d’assistance sociale souffrent de carences[10].
Le caractère « automatique » du système apparaît dans toute sa cruauté au stade du recours. Bien qu’il soit possible de contester la décision du Secrétariat d’Etat aux migrations devant le Tribunal administratif fédéral, les juges n’ont aucune marge de manœuvre en raison du caractère objectif du critère instauré par le Règlement « Dublin ». De même, les possibilités d’argumentation de l’avocat sont réduites à néant, transformant le recours en pur exercice alibi.
Mise en œuvre de l’initiative « sur l’expulsion des étrangers criminels ».
Un autre exemple illustratif est la mise en œuvre de l’initiative « sur l’expulsion des étrangers criminels », à laquelle j’ai fait référence en introduction. Celle-ci s’est heurtée à de grandes difficultés, puisqu’il s’agissait de traduire en loi un système qui contredit un principe fondamental inscrit dans la Constitution fédérale… Après de nombreuses tergiversations, le Parlement suisse a adopté une modification du Code pénal qui est entrée en vigueur le 1er octobre 2016[11].
Les député-e-s se sont rangés derrière le texte de l’initiative en introduisant un article 66a, intitulé « expulsion obligatoire », qui contraint le juge pénal à prononcer l’expulsion d’une personne de nationalité étrangère pour l’un des délits énumérés dans une liste, pour une durée de cinq à quinze ans, et ceci quelle que soit la quotité de la peine. Définie comme une « mesure », elle ne peut pas être assortie d’un sursis. Le caractère automatique de l’expulsion n’est tempéré que par une clause figurant à l’alinéa 2 de l’article 66a, prévoyant que le juge peut « exceptionnellement » y renoncer si l’étranger devait se retrouver « dans une situation personnelle grave », et si ses intérêts privés à demeurer en Suisse l’emportent sur les intérêts publics à son éloignement. Ainsi, dans le nouveau dispositif légal, le principe de proportionnalité prend un caractère exceptionnel, alors qu’il est censé se situer au cœur de l’Etat de droit. On voit bien là la mise à l’écart d’une règle fondamentale destinée à protéger les individus.
Certains juges témoignent de leur malaise face à cette privation d’un outil essentiel de leur travail, qui est la liberté d’appréciation et de tenir compte des particularités de chaque situation[12]. L’automaticité de l’expulsion vient évidemment empêcher cet examen indépendant et libre du juge. Après une année d’application, il apparaît que les Cours supérieures ont plutôt tendance à faire une application rigoureuse de cette disposition, en corrigeant des jugements trop « généreux » des tribunaux de premières instances[13]. Des cas ont été signalés où des personnes ont été condamnées à une expulsion, alors même qu’elles avaient été frappées d’une peine de prison … avec sursis[14] !
Dans ce contexte, l’avocat est également fortement limité dans son action, puisqu’il n’y a pour ainsi dire plus de place pour une argumentation. Le juge doit vérifier si la personne se trouve dans l’un des cas énumérés par la loi, et le défenseur de l’accusé ne peut rien opposer à cela. Le paradoxe est que le Parlement suisse a voulu offrir une meilleure protection juridique en instituant une défense obligatoire lorsqu’une expulsion est envisageable en vertu de l’article 66a du Code pénal[15]. Mais ceci ne change rien au fait que l’avocat n’aura aucun élément à opposer au texte légal et à l’automaticité prévue.
Peines-plancher dans le domaine de la circulation routière
Une même logique d’automaticité se retrouve dans le domaine de la circulation routière. Le 20 octobre 2010, le Conseil fédéral suisse présentait un nouveau programme d’action intitulé « Via sicura », destiné à améliorer la sécurité routière et à lutter contre les « chauffards »[16]. Après débats au Parlement fédéral, une modification législative est adopté le 15 juin 2012, pour entrer en vigueur le 1er janvier 2013[17].
Allant au-delà de ce qui avait été proposé par le gouvernement, les parlementaires ont notamment introduit des peines-plancher pour certaines infractions considérées comme graves. Dans ces cas définis à l’article 90, alinéa 3 de la Loi fédérale sur la circulation routière, la personne condamnée encourt une peine privative de liberté d’un à quatre ans. Mais surtout, il est désormais prévu que cet alinéa « est toujours applicable » à partir de certains seuils de dépassement de la vitesse maximale autorisée, même en l’absence d’accident.
Dans ces cas, le juge est désormais lié par la définition d’un chauffard et ne peut que constater la réalisation des éléments objectifs de l’infraction, et ce quelles que soient les circonstances. Comme l’ont relevé les tribunaux, le législateur a explicitement souhaité restreindre le pouvoir d’appréciation du juge quant aux éléments subjectifs de l’infraction[18]. On retrouve ici cette méfiance des parlementaires contre des juges suspectés de laxisme.
Ici aussi, comme dans l’exemple de l’expulsion obligatoire, des juges ont exprimé leur malaise face à un système aussi rigide, comme il en ressort d’une motion déposée au Conseil national le 12 mars 2015[19], revendiquant le rétablissement de la proportionnalité et déplorant la méfiance à l’encontre du pouvoir judiciaire. La réponse du gouvernement à cette motion est assez édifiante : « C’est donc le législateur – et non les tribunaux – qui détermine quand les conditions « nécessaires » sont remplies »[20].
Cette injonction absolument contraignante du législateur sur le juge a aussi une influence sur le travail de l’avocat. Ce dernier et tout autant dépourvu de tout argument de défense efficace, puisque la loi impose une solution lorsque certaines conditions de fait sont réunies.
Initiative « sur l’autodétermination »
Le 25 octobre 2014, le SVP a décidé de lancer une nouvelle initiative populaire « pour l’autodétermination – Selbstbestimmung », dont l’objectif affiché est de faire prévaloir le droit interne suisse[21]. Le texte proposé s’en prend ouvertement à toutes les conventions internationales qui seraient en contradiction avec la Constitution fédérale, et donc avec les textes approuvés en votation populaire. Dans le collimateur du SVP, les conventions de protection des droits humains, et tout particulièrement la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et le tribunal siégeant à Strasbourg chargé d’en assurer l’application par les Etats signataires.
La récolte des signatures a démarré le 10 mars 2015, pour être déposée le 12 août 2016 avec 116’428 signatures valables. La Chancellerie fédérale a confirmé l’aboutissement de l’initiative, qui est actuellement discutée devant de Parlement suisse.
Cette attaque claire aux droits fondamentaux est subtilement intitulée : « Le droit suisse au lieu de juges étrangers », invocation manipulatoire et mensongère du droit, de l’histoire suisse et de la notion d’autodétermination. En réalité, cela fait des années que le SVP critique le droit international et la CEDH. Le 16 août 2007, Christoph Blocher, alors ministre de la justice au gouvernement fédéral, a prononcé un discours officiel où il assimilait le droit international à une « invasion étrangère »[22]. La veille, lors d’une apparition télévisée, il déclarait ouvertement viser l’affaiblissement de principe des arguments liés à la défense des droits humains dans les processus d’établissement des lois et de leurs applications.
Pour justifier son initiative, le SVP met en avant quelques exemples de jugements de Strasbourg qui ont condamné la Suisse, censés montrer l’hégémonie des « juges étrangers ». La question à poser serait, selon le parti, « Comment la Suisse peut-elle reprendre le contrôle de son droit?». Le coupable désigné serait la figure du juge qui refuse d’appliquer des dispositions nationales parce que contraires à des normes fondamentales supérieures de protection des droits humains. Le SVP prétend ainsi faire prévaloir le droit interne sur tout autre considération, mais surtout imposer les textes qu’il fait adopter en votation populaire, comme par exemple son initiative « pour le renvoi des étrangers criminels » malgré l’atteinte portée au principe de proportionnalité.
Cette nouvelle offensive pose toute une série de problèmes qu’il n’est pas possible d’aborder ici. Je retiens, dans le cadre de cette réflexion, la méfiance extrême à l’égard du juge contenue dans cette proposition, qui se combine avec une volonté de limiter la protection offerte par le droit international. Là aussi, par ricochet, la marge de manœuvre de l’avocat s’en trouvera réduite, puisqu’un fondement argumentatif aussi essentiel que les conventions internationales perdrait toute portée pratique.
Le totalitarisme législatif contre les Juges
Les exemples que je viens de mentionner révèlent ce qu’il convient d’appeler un « totalitarisme législatif », qui porte une sérieuse atteinte à la séparation des pouvoirs, autre principe fondamental de l’Etat de droit remontant aux réflexions philosophiques de Montesquieu avant la Révolution française.
La méfiance portée par certains courant politiques à l’encontre des juges n’est pas un phénomène limité à la Suisse. Des personnalités politiques comme David Cameron au Royaume Uni, Vladimir Poutine en Russie, Silvio Berlusconi en Italie, Nicolas Sarkozy en France ou encore Donald Trump aux Etats-Unis d’Amériques se sont exprimées avec virulence contre les décisions de tribunaux qui tendaient à limiter leurs pouvoirs en faisant prévaloir les droits fondamentaux. Le président de la Turquie, Recep Tayyip Erdoğan, s’est également distingué par des mesures extrêmement incisives à l’encontre de juges opposés à sa vision de la politique. Ces figures politiques reprochent à ces juges … de ne pas s’adapter à l’ordre qu’elles entendent établir.
J’observe ainsi une disparition des aspects protecteurs du droit, et, en symétrie, la croissance d’une nouvelle forme d’autoritarisme. Le débat récent en France sur la pérennisation des mesures exceptionnelles de l’état d’urgence dans la loi « renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme » en est un exemple frappant[23]. Je reprends à mon compte la réflexion de François Sureau, à propos de ce débat : « Les libertés peuvent revenir si on les suspend, mais non lorsqu’on introduit dans le droit des dispositions qui les atteignent dans leur principe même et les annulent »[24].
En parallèle, il faut aussi nous interroger sur les limites montrées par le système international de protection des droits humains. Si l’on se réfère par exemple à la pratique de la Cour européenne de Strasbourg[25], on constate qu’une grande partie des arrêts rendus concernent la Russie et le Turquie, membres du Conseil de l’Europe, condamnant très régulièrement ces pays pour des violations graves et répétées des droits garantis par la CEDH, dont le droit à la vie et la prohibition de la torture et des traitements inhumains, cruels ou dégradants. La protection des droits humains conférée par la CEDH et son tribunal s’est avérée incapable d’empêcher l’évolution de ces deux pays vers des régimes de plus en plus autoritaires et répressifs.
Force est donc de constater que les dominants veulent aujourd’hui mettre fin à l’Etat de droit, et qu’ils sont en train d’avancer dans cette direction. Certes, personne ne parle de revenir à la monarchie absolue de l’Ancien Régime antérieur aux Révolutions française et américaine notamment. Mais la volonté d’affirmer un système politique autoritaire et contraire aux droits fondamentaux est incontestable.
Si je me réfère aux concepts utilisés dans le cadre de ce colloque, je constate donc que le juge comme l’avocat sont mis en situation d’exil, car réduits à l’impuissance par ces mécanismes législatifs, ou alors confinés à un rôle alibi. Parfois, ils sont même transformés en rouages obligatoires de ce nouveau régime autoritaire. Dans les situations présentées plus haut, le juge comme l’avocat sont placés devant un très épineux dilemme, soit appliquer la solution qui lui est dictée par la loi sans aucune marge de manœuvre, soit désobéir à la loi ce qui leur pose à l’évidence de grandes difficultés.
Pour sortir de l’exil
Dans mes interventions lors des derniers colloques[26], j’ai mis en avant la notion de résistance. L’enjeu est de déterminer comment, tout en restant à distance des institutions et de l’Etat, il est possible de résister de manière efficace aux phénomènes que j’ai décrits, du point de vue des praticiens du droit, juges ou avocats. Quel refuge pouvons-nous proposer aujourd’hui aux avocats et aux juges qui sont placés en situation d’exil par le biais de ces évolutions législatives autoritaires et contraignantes ?
Je précise ici que, quand je fais référence aux juges et aux avocats, je ne me réfère pas à leurs statuts sociaux, mais bien au rôle qu’ils sont amenés à jouer dans la protection des individus. Je n’ignore pas qu’ils tendent à appartenir aux catégories sociales dominantes, et que l’on peut avoir une certaine méfiance face à certains juges connus pour leurs opinions conservatrices et rétrogrades. Toutefois, penser que l’on peut se passer de la figure du juge me paraît dangereux. Pour prendre l’exemple frappant de l’Allemagne national-socialiste, l’interprétation du concept de « détention préventive » (Schutzhaft) par le nouveau régime à partir de 1933 a permis à la police allemande de s’affranchir de tout contrôle judiciaire ; on sait à quelles extrémités ceci a mené. Sous le nazisme toujours, le système judiciaire allemand a fait l’objet d’une politique dite de « coordination », autrement dit de mise au pas. Autre régime autoritaire, le système d’apartheid a aussi été caractérisé par un légalisme très développé[27]. Ceci nous rappelle que le formalisme juridique ne garantit en rien que le contenu du droit positif protège réellement les droits fondamentaux : le droit constitue toujours un processus politique qu’il faut apprécier et critiquer.
Une démarche de résistance intéressante à rappeler dans ce contexte est celle qui s’est développée en France, dans le cadre de la démarche collective de « l’Appel des Appels ». Des professionnel.le.s du droit avaient dénoncé le déclin des libertés et un certain nombre de problèmes graves affectant le fonctionnement de l’Etat de droit et de la justice[28]. Ce qui me paraît source d’inspiration est le caractère collectif de cette action, qui a permis de recueillir des témoignages et de documenter les dénonciations, rendant ainsi les problèmes visibles à l’ensemble de la société. Or, vu les caractéristiques individualistes qui marquent les rôles de juges ou d’avocats, une telle action collective n’a rien d’évident.
On peut s’inspirer de l’action du « Collectif R » qui mène, dans le canton de Vaud, une lutte depuis début mars 2015 contre les décisions de renvoi basées sur le Règlement Dublin[29]. Plusieurs dizaines de personnes frappées par de telles décisions ont été soustraites au renvoi en étant placées dans un refuge d’église. Le choix de ce lieu s’explique par le fait que les autorités n’ont pas encore fait le pas de forcer l’entrée des églises pour se saisir des personnes à renvoyer. Ce mode d’action a eu dans un premier temps un fort impact en créant un débat public et politique, constituant un élément de résistance important contre une législation perçue comme illégitime dans un contexte de crise des politiques d’asile dans toute l’Europe. Deux ans plus tard, le refuge d’église continue de protéger des personnes menacées de renvoi, mais sans plus avoir la capacité d’imposer une controverse publique dans la société sur le Règlement Dublin. La résistance collective permet de sauver des cas individuels, tandis que les autorités font désormais comme si le mouvement n’existait plus. La politique du pays de premier accueil n’est pas remise en cause par les gouvernants, alors que ses limites sont chaque jour plus criantes. La question qui se pose alors est de savoir comment le mouvement de résistance peut réussir à être efficace dans une perspective de transformation sociale.
Ce mouvement a bien montré également que, pour les juges et les avocats placés dans une impasse par le système légal automatique et verrouillé du Règlement « Dublin », il est nécessaire de quitter leur rôle : pour espérer influer sur la réalité politique, il faut assumer le rôle du militant-désobéissant. Questions qui restent ouvertes : comment ensuite faire revenir le débat sur le plan politique et juridique ? Comment constituer une force sociale suffisamment puissante pour imposer le respect des droits fondamentaux dans un contexte où les institutions politiques sont en train d’implémenter des systèmes autoritaires ?
PUBLICATIONS
« De quelques problèmes autour du cadre (Bléger) qui contient la vie politique », (Re)Penser l’exil, revue en ligne n° 6/7, exil-ciph.com/revue-en-ligne/2016-2/
« Violence étatique dans le droit d’asile et d’immigration suisse – Transformation de l’État », (Re)Penser l’exil, revue en ligne n° 5, exil-ciph.com/revue-en-ligne/revue2015/
Du droit d’asile à la gestion de stock humain (ou comment réduire à néant l’hospitalité et les droits), Vivre Ensemble, Hors-Série #3, Genève 2013, asile.ch/wp/wp-content/uploads/2013/10/Tafelmachertout_final_.pdf
« Suisse, CEDH et mise en péril de l’État de droit », Plaidoyer, n° 1/12 (en collaboration avec Hüsnü Yilmaz).
Une philosophie générale d’ouverture à un seul monde (one world). Démocratiser la démocratie. Commun, migration, égalité, Caloz-Tschopp Marie-Claire, De Coulon Graziella, Tafelmacher Christophe, Genève-Lausanne, 2011, exil-ciph.com/wp-content/uploads/2015/09/OneWorld_fr.pdf
« Du bannissement en droit suisse : archaïsme ou modernité? », (Re)Penser l’exil, revue en ligne n°1, exil-ciph.com/revue-en-ligne/2011-2/
« Polémique sur l’expulsion des « criminels étrangers » et projet de transformation radicale de l’Etat », in Chimères, revue des schizoanalyses, n° 74 « Biopolitiques ? », Paris été 2010.
[1] Publié dans les Actes du Colloque de Genève, Desexil. L’émancipation en Actes, 2018.
[2] Colloque international « Violence, politique, exil/désexil dans le monde d’aujourd’hui », Istanbul 2014. Colloque international « José Bléger à Genève », 2015.
[3] Povlakic Karine, Suppression de l’aide sociale, un instrument de contrainte, Editions d’En Bas & SAJE, Lausanne 2011.
[4] Tafelmacher Christophe, « Minage des droits fondamentaux », Vivre Ensemble, n° 155, décembre 2015. Plateforme d’information humanrights.ch, « Non à l’initiative de mise en œuvre = Oui à l’État de droit », www.humanrights.ch/fr/droits-humains-suisse/interieure/politique-etrangers/divers/non-initiative-de-mise-uvre-oui-etat-de-droit.
[5] Le nom allemand de ce parti donne la meilleure approche de son profil : « Schweizerische Volkspartei » (SVP), soit parti suisse du peuple. En français, il se dénomme « Union démocratique du centre » (UDC).
[6] cf.: http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=LEGISSUM:l33153
[7] Cf. statistiques officielles www.sem.admin.ch/sem/fr/home/publiservice/statistik/asylstatistik.html.
[8] Cf. Cour européenne des droits de l’homme, Strasbourg, arrêts M.S.S. c. Belgique et Grèce (requête n° 30696/09), 21 janvier 2011, et Tarakhel c. Suisse (requête n° 29217/12), 4 novembre 2014.
[9] Povlakic Karine, Accord de Dublin. La banalisation d’une tragédie, Vivre Ensemble, Hors-série #2, avril 2013.
[10] Cf. arrêt F-3356/2017 rendu le 21 juin 2017 par le Tribunal administratif fédéral. jurispub.admin.ch/publiws/?lang=fr.
[11] Recueil officiel 2016, pages 2329 – 2346. www.admin.ch/opc/fr/official-compilation/2016/2329.pdf.
[12] Ainsi lors d’une conférence donnée le 1er juin 2017 à l’occasion de l’assemblée générale des Juristes progressistes vaudois à Lausanne.
[13] Colloque « L’expulsion pénale », vendredi 22 septembre 2017, organisé par les professeurs Minh Son Nguyen et Maya Hertig Randall à UniBastions, Genève.
[14] Cf. aussi : RTS Info, « Polémique après l’annulation de l’expulsion d’un Allemand à Zurich », 14 octobre 2017, www.rts.ch/info/regions/autres-cantons/8999349-polemique-apres-l-annulation-de-l-expulsion-d-un-allemand-a-zurich.html
[15] Modification de l’article 130, lettre b, du Code fédéral de procédure pénale.
[16] Message du Conseil fédéral suisse du 10 octobre 2012. www.admin.ch/opc/fr/federal-gazette/2010/7703.pdf.
[17] Cf. publication au Recueil officiel : www.admin.ch/opc/fr/official-compilation/2012/6291.pdf
[18] Cf. notamment Tribunal fédéral suisse, Cour de droit pénal, arrêt du 1er juin 2016 dans la cause 20166B_165/2015, entscheide.weblaw.ch/cache.php?link=01.06.2016_6B_165-2015
[19] Assemblée fédérale, Jean-Paul Gschwind, Motion 15.3125 « Via sicura. Rétablir la proportionnalité des sanctions pénales et administratives », www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/#k=15.3125.
[20] Ibidem, avis du Conseil fédéral du 8 mai 2015.
[21] Cf. la page Internet « Initiative pour l’autodétermination: Résumé chronologique » : www.humanrights.ch/fr/droits-humains-suisse/interieure/democratie-directe/autodetermination/initiative-autodetermination-chronologie .
[22] Cf. la page Internet : « Ministre suisse de la justice contre les droits humains internationaux », www.humanrights.ch/fr/droits-humains-suisse/interieure/democratie-directe/autodetermination/ministre-suisse-de-justice-contre-droits-humains-internationaux.
[23] Plenel Edwy, « Quand la liberté s’éteint en silence », publié le 3 octobre 2017 sur le site Mediapart : www.mediapart.fr/journal/france/031017/quand-la-liberte-s-eteint-en-silence.
[24] Sureau François, Pour la liberté, Editions Tallandier, Paris 2017.
[25] Cf. la page de recherche des arrêts et communiqués de la Cour : hudoc.echr.coe.int/fre#{%22documentcollectionid2%22:[%22GRANDCHAMBER%22,%22CHAMBER%22]}
[26] Cf. note 1.
[27] Spira Raymond, Le nazisme, l’apartheid et le droit. Quand l’injustice se fait loi, Editions Alphil, Neuchâtel 2016.
[28] Portelli Serge, « La Justice et l’Appel des appels », in : Gori Roland, Cassin Barbara, Laval Christian (dirs.), L’Appel des appels, Pour une insurrection des consciences, Editions Mille et une nuits, Paris 2009, pp. 79-88.
[29] Cf. le site Internet www.desobeissons.ch/
Les pages Internet référencées dans les notes ont été consultées le 15 octobre 2017.