Privatif
Rapport social, rapport d’objet, bons mauvais objets
Symbiose et ambiguïté. Différentiation….Clivage
(1957 : mot du néerl. D’Afrique du Sud, littéral. « séparation »). Ségrégation des populations de races différentes en Afrique du sud.
- ségrégation, séparer du troupeau. Action de mettre à part ; le fait de séparer (en parlant d’éléments d’une masse ou d’un groupe). 2. Ségrégation raciale : séparation absolue, organisée et réglementée de la population de couleur d’avec les blancs (dans les écoles, transports, magasins, etc.). Apartheid, discrimination raciale. – Par ext. (Xxe s.). Séparation imposée, plus ou moins radicale, de droit ou de fait, de personnes, de groupes sociaux ou de collectivités suivant la condition sociale, le niveau d’instruction, l’âge, le sexe (sexisme). Bâtie sur le slogan : égaux mais différents. « On sait que l’idée d’égalité dans la différence en fait manifeste toujours un refus de l’égalité. La ségrégation a amené aussitôt la discrimination » (Beauvoir).
- Politique ségrégationniste « L’univers concentrationnaire et ségrégationniste dont sont encore victimes les malades mentaux » (Le Monde, 17-3-1968).
Apartheid et mobilité des populations
« … l’institution d’un apartheid mondial, ou d’un double régime de circulation des individus, soulève de redoutables problèmes politiques et d’institution. Le color bar qui désormais ne sépare plus seulement « centre » et « périphérie », ou Nord et Sud, mais traverse toutes les sociétés n’est est pour cette raison même qu’un équivalent approché assez malaisé, dont le maniement, dans les faits, est massif, mais à double tranchant, parce qu’il renforce un racisme incontrôlable, et favorise l’insécurité qui appelle à une surenchère de dispositions sécuritaires. Sans compter qu’entre les deux extrêmes, ceux qui font circuler les capitaux et ceux que les capitaux font circuler, au gré des « délocalisations » et de la « flexibilité », il y a une énorme masse intermédiaire non classifiable», Balibar, GGE, qu’est-ce qu’une frontière, 339-340
Matérialisation d’un fonctionnement différentiel, avec des dédoublements de la notion de frontière
Développement séparé, l’Autre désigné comme Autre est le « mauvais objet ».
Apartheid et construction de l’égalité
« Les hommes ne naissent pas frères ; ils ont à se découvrir mutuellement, et c’est cette découverte que l’apartheid cherche à empêcher. Qu’est-ce que l’apartheid ? Cela dépend de celui qui répond. Si vous interrogez un membre du gouvernement sud-africain, il vous dira que c’est le développement séparé et parallèle du monde des Blancs et du monde des Noirs. Si vous interrogez un Blanc ordinaire qui soutient cette politique, il vous dira que c’est le moyen de préserver l’Afrique du Sud blanche. Si vous interrogez un Noir… bon, il pourra vous donner l’une de la douzaine de réponses découlant d’un quelconque aspect de l’apartheid auquel il vient de se heurter ce jour-là, parce que pour lui ce n’est ni un concept idéologique ni une politique, mais un contexte dans lequel sa vie tout entière – étudier, travailler, aimer – est étroitement enserrée. Il pourra vous donner une liste de lois qui l’empêchent de prétendre à la plupart des objectifs auxquels aspire tout être civilisé, ou qui l’empêchent de jouir des plaisirs que les autres considèrent comme allant de soi. Mais il est peu probable qu’il répondra de cette manière. Ce qui est peut-être sa préoccupation du moment, c’est de savoir comment il pourra faire échapper son fils, qui est très doué, à l’ “enseignement bantou” au rabais qui vient, dans les écoles pour enfants noirs, de remplacer l’enseignement normal. Ou peut-être trouverez-vous un de ces matins après avoir passé une nuit au poste de police parce qu’il était sorti après le couvre-feu sans avoir le bout de papier signé par un Blanc qui en donne la permission. Peut-être encore (s’il s’agit d’un homme pour qui ces choses comptent) est-il amer parce qu’on donne en ville un concert auquel il n’est pas admis, ou (si ce n’est pas son genre) est-il irrité d’avoir à payer au prix du marché noir une bouteille d’alcool qu’il lui est interdit d’acheter légalement. L’apartheid, voilà ce que c’est pour lui. Toutes ces choses, importantes ou minimes, et bien d’autres encore. (…) En faisant l’effort de vivre séparément, les Noirs et les Blancs se détruisent moralement. Il est possible que, vivant ensemble, nous parvenions à survivre à la domination blanche, à la domination noire, et à tous les autres subterfuges qui nous cachent les uns aux autres, et à découvrir que nous sommes identiques en tant qu’hommes. Le moins que l’on puisse espérer serait d’admettre que nous n’avons ni plus ni moins de raisons de nous craindre mutuellement que n’en ont les autres hommes. »
Nadine Gordimer, « Qu’est-ce que l’apartheid ? », Vivre dans l’espoir et dans l’Histoire, Paris, Plon, 1999, 101-110.
Clivage (du moi)
Allemand : Ichspaltung, Anglais : Splitting of the ego.
Terme introduit en 1927 par Freud pour désigner un phénomène propre au fétichisem, à la psychose puis à la perversion en général, et qui se traduit par la coexistence au sein du moi de deux attitudes contradictoires, l’une consistant à dénier la réalité (déni), l’autre à l’accepter.
Les notions de Spaltung (clivage), de dissociation et de discordance furent d’abord développées à la fin du XIXe s. par toutes les doctrines qui étudiaient l’automatisme mental, l’hypnose et les personnalités multiples. De Pierre Janet à Josef Breuer, tous les cliniciens de la double conscience (y compris le jeune Freud) voyaient dans ce phénomène de coexistence de deux domaines ou de deux personnalités s’ignorant mutuellement une rupture de l’unité psychique qui entraînait un trouble de la pensée et de l’activité associative et conduisait le sujet à l’aliénation mentale et donc à la psychose. C’est dans ce care qu’Eugen Bleuler fit de la Spaltung le trouble majeur et primaire de la schyzophrénie (du grec skhizein : fendre), c’est-à-dire de cette forme de folie caractérisée par une rupture de tout contact entre le malade et le monde extérieur. Un an plus tard, le psychaître français Philippe Chaslin appela discordance un phénomène identique auquel il donna le nom de folie discordante.
Partant de cette terminologie et de la description, sur le terrain de l’hystérie, de phénomènes identiques, Freud fut en quelque sorte conduit à introduire la dissociation (Spaltung) dan le moi. Dans le cadre de sa 2ème topique et d’une réflexion sur le déni et le fétichisme, il forgea donc le terme de clivage du moi (Ichspaltung). Par là même, il ramenait la discordance au cœur du moi, alors que la psychiatrie dynamique la situait entre deux instances et la caractérisait comme un état d’incohérence plutôt que comme un phénomène structural.
Mélanie Klein reprit la notion freudienne pour déplacer le clivage vers l’objet et élaborer ainsi sa théorie des bons et des mauvais objets, tandis que Jacques Lacan marqué par la tradition psychiatrique française, employa d’abord en 1932 le terme de discordance pour définir une différence (de la folie) par rapport à la norme. 20 ans plus tard, il forgea une collection de mots pour désigner les différentes modalités d’un clivage non seulement du moi mais du sujet. Dans le cadre de sa théorie du signifiant, il montrait en effet que le sujet humain est divisé deux fois – une 1ère instance séparant le moi imaginaire du sujet de l’inconscient, et une 2ème s’inscrivant à l’intérieur même du sujet et l’inconscient pour représenter sa division originelle. Cette deuxième division, il l’appelait refente d’après l’anglais fading (to fade : perdre sa luminosité), ain de rendre l’idée d’évanouissement (du sujet et de son désir) proche de ce qu’E. Jones appelait aphanisis.
Comme Mélanie Klein, Lacan étendait la notion de clivage à la structure même de l’individu dans sa relation à autrui, alors que Freud, tout en ouvrant la voie à ce type de généralisation, l’avait essentiellement utilisée dans la clinique de la psychose et de la perversion.
Dictionnaire de la psychanalyse, E. Roudisnesco.